Université de Montréal

Association des professeurs retraités
de l'Université de Montréal



Grains de sagesse

Automne 2002, numéro 5

Notre caisse de retraite est en bonne santé, malgré tout…!

Pour la majorité des membres de l'APRUM, la rente qui leur est versée par le Régime de retraite de l'Université représente une forte proportion de leur revenu annuel. Il est donc légitime de manifester quelques craintes et de s'interroger sur les conséquences négatives que pourraient avoir sur la sécurité de notre revenu, à court et à long terme, les tribulations boursières des derniers et des prochains mois.

Nul n'étant prophète, notre degré de confiance doit nous être dicté par la nature des résultats obtenus par les administrateurs du Régime au cours des dix dernières années. En effet, c'est sur le long terme, et non le court terme, que doit se mesurer la performance d'une caisse de retraite. Les nombreuses bonifications apportées aux prestations, au cours des dernières années (dont la garantie d'indexation des rentes à 100 % de l'accroissement de l'IPC) témoignent de la bonne santé de notre caisse de retraite et devraient nous rassurer.

Néanmoins, on peut se demander ce qu'ont été les résultats des trois dernières années, et plus particulièrement des derniers douze mois. Une évaluation actuarielle des engagements du Régime a été effectuée en date du 31 décembre 2001. Un Comité spécial, formé de trois experts externes, en a étudié les résultats et, après ajustement des paramètres pour tenir compte des tendances observées, a comparé le passif actuariel à l'actif net disponible pour le service des prestations. La conclusion de cette analyse est que le surplus actuariel s'est accrû au point de permettre de nouvelles bonifications aux engagements contractés envers les membres. Ainsi, sur recommandation de Comité de retraite, le Conseil de l'Université, à sa réunion du 28 septembre dernier, a adopté cinq modifications positives aux règlements du Régime, et lorsque requis, a procédé aux ajustements nécessaires du Programme surcomplémentaire de retraite. Nous allons passer en revue, sommairement, les principaux éléments du Rapport du Comité spécial d'experts et les modifications aux règlements qui ont été autorisées. De plus, nous ferons quelques commentaires sur la part des avantages additionnels dont bénéficieront les membres retraités; nous en conclurons que certaines démarches de la part de l'APRUM s'imposent.

L'évaluation actuarielle du Régime a pour objet de chiffrer, à une date précise, la valeur monétaire des obligations (passées et à venir) contractées envers les membres en vertu de ses règlements. Elle suppose que certaines hypothèses soient retenues, dont la validité doit être établie à partir d'études pertinentes. Ces hypothèses actuarielles sont soit économiques, soit démographiques : taux d'inflation, hausses de salaire et taux d'intérêt, pour les premières, hausses promotionnelles, mortalité, taux de départ, taux de prise de retraite, proportion des membres avec conjoint et différences d'âge, pour les secondes. Sans être un spécialiste de ces matières, on peut constater à la lecture du Rapport du Comité spécial que les experts ont apporté grand soin à l'établissement des hypothèses économiques, faisant preuve de prudence, mais sans dramatiser la situation actuelle. Autant de soin a été mis dans l'estimation des paramètres démographiques qui prennent en compte le comportement passé et les tendances récentes des membres de la Caisse. En particulier, l'estimation de l'évolution des traitements tient compte non seulement des gains de compétence et des pressions consécutives aux effets prévisibles de l'inflation, mais également, en raison du rythme accéléré des départs à la retraite parmi les professeurs, de la forte compétition que se livreront les universités pour le recrutement de la relève. À partir des hypothèses retenues, le passif actuariel, au 31 décembre 2001, a été établi à 1,529 milliard de dollars.

Pour déterminer le surplus actuariel, il faut évaluer l'actif de la Caisse. Le calcul est plus conventionnel puisqu'il s'agit de la valeur marchande du portefeuille des placements que l'on corrige selon une formule qui effectue un lissage des fluctuations du marché sur les cinq dernières années ; le résultat représente ce qu'on appelle l'actif actuariel. Au 31 décembre 2001, la valeur marchande de l'actif était de 1,766 milliard de dollars et la correction négative de 11 millions. Il en résulte que la valeur de l'actif actuariel est de 1,755 milliard de dollars. L'état de notre Régime de retraite se solde donc par un surplus actuariel de 226 millions de dollars. Nous reviendrons sur l'utilisation de ce surplus.

L'évolution annuelle de la valeur de l'actif est due à l'apport des cotisations des membres et de l'Université, aux revenus nets de placement et à la modification de la juste valeur des placements, desquels il faut soustraire les prestations versées, les remboursements et les montants transférés, de même que les frais de fonctionnement (environ 0,13% de l'actif). La croissance de l'actif dépend en grande partie du rendement des placements. Calculés au 31 décembre 2001, les accroissements ont été de 282 millions de dollars sur 3 ans, de 553 millions sur 5 ans et de 1 050 millions sur 10 ans. Les rendements bruts de la Caisse pour ces trois périodes ont été de 8,1%, de 9,9% et de 11,2% ; ces résultats nous plaçaient dans le quartile supérieur parmi quelque 80 fonds de retraite canadiens dont l'actif excède 250 millions de dollars.

Seulement 19 caisses de retraite, parmi les 100 plus importantes au Canada, ont vu leur actif croître en 2001. Tout étant relatif à l'état général des marchés, les résultats obtenus entre le 1er juillet 2001 et le 30 juin 2002 sont encore plus impressionnants. En effet, sur cette période de 12 mois, le rendement a été de 7,1% et pour les 6 six premiers mois de 2002, le rendement (annualisé) a été de 2,8%, performances qui nous placent, pour chacune de ces deux périodes, au 1er rang des caisses de retraite dont l'actif excède 250 millions de dollars. Au cours des 12 derniers mois, les actions au portefeuille de notre Caisse de retraite ont obtenu des rendements de près de 15% supérieurs aux rendements boursiers correspondants (Toronto, New York, NASDAQ, Europe, Asie). De quoi donner confiance dans la robustesse de notre Caisse. Ces résultats remarquables sont dus à la vigilance de notre Comité de placement et à l'efficacité des seize gestionnaires de portefeuille entre lesquels le Comité a réparti les fonds à investir.

Il faut s'attendre à ce que le rendement global à la fin de 2002 soit légèrement négatif - ce ne sera pas la première fois - tout en demeurant satisfaisant sur une base comparative. Il convient de rappeler que le Comité de placement a imposé une règle qui veut qu'aucun titre n'accapare plus de 9% de la valeur des investissements. Cette règle a pour conséquence, par exemple, que le volume de nos participations dans Nortel ou BCE est limité, si bien que les déboires récents de ces titres ne nous ont pas pénalisé autant que d'autres caisses de retraite (qui avaient été gagnantes, il y a deux ou trois ans, lors de la montée des valeurs du secteur technologique).

Tel qu'indiqué précédemment, nous disposions d'un surplus actuariel évalué à 226 millions de dollars, au 31 décembre 2001. La législation de Revenu Canada impose une limite supérieure au montant que la Caisse peut conserver au titre du surplus actuariel. Cette limite dépend du passif actuariel et de la valeur des cotisations. En vertu des règles de calcul en cause, le respect de cette limite impose qu'un peu plus de 50 millions de dollars soient redistribués aux membres, sous forme de bénéfices additionnels. Le Conseil de l'Université a approuvé cinq bonifications aux prestations garanties :

1. Tel que l'exige le Règlement de la Caisse, une somme de 13 534 000 $ a été prélevée pour garantir l'indexation à 100% de l'IPC des crédits de rente pour services rendus de juillet 2002 à décembre 2005. Rappelons que les crédits de rentes gagnés jusqu'en juin 2002 bénéficient déjà de cette indexation à 100% de la hausse du coût de la vie. Cette mesure n'affecte donc pas les membres déjà à la retraite.

2. Pour les personnes qui prendront leur retraite le ou après le 1er juin 2002, le calcul de la rente se fera sur la moyenne des trois années de service, pas nécessairement consécutives, où le salaire annuel a été le plus élevé. Le coût de cette bonification est de 15 788 000 $. Notons que cet avantage n'est accordé qu'à ceux dont la moyenne des cinq meilleures années dépassera 54 700 $, puisque la règle des trois ans s'applique déjà pour les autres. Il n'y a aucune rétroactivité à ce bénéfice, donc aucun avantage pour les membres déjà à la retraite ! Nous en reparlerons…

3. Une prestation de transition sera versée à ceux qui prendront leur retraite entre 55 ans et 60 ans. Le montant de la prestation sera égal à la pension de la sécurité de la vieillesse, pourvu que le bénéficiaire compte 30 années de service ; sinon elle sera réduite. Un prélèvement de 10 992 000$ a été nécessaire. Cette prestation était déjà acquise à la retraite prise entre 60 et 65 ans. Il n'y a aucune rétroactivité à ce bénéfice, donc aucun avantage pour les membres déjà à la retraite.

4. La prestation de décès après la retraite garantit un paiement pour le solde des cinq années si le décès survient au cours des cinq ans qui suivent la prise de la retraite. Cette garantie est portée à dix ans pour les participants sans conjoint. L'objectif est de compenser ces derniers qui sont désavantagés du fait qu'ils ne bénéficient pas de la garantie d'un versement de 60% de la rente au conjoint survivant. La garantie établie sur dix ans s'appliquera dans le cas des décès survenus après la date d'adoption de la modification par le Conseil de l'Université ; elle s'appliquera donc à un membre déjà retraité qui décéderait, sans conjoint admissible, dans les dix ans suivant la prise de sa retraite. Cette garantie retire 384 8000 $ du surplus actuariel.

5. La retraite pourra se prendre sans pénalité à partir de 59 ans pour ceux qui auront 35 ans de service. Le coût de cet avantage, offert aux membres actifs, est de 8 053 000 $.

Les cinq modifications recommandées par le Comité de retraite et autorisées par le Conseil de l'Université retranchent un total de 53 193 000 $ des 226 millions disponibles, ce qui réduit le surplus actuariel à 173 millions de dollars. Cette somme constitue une réserve pour insuffisance des cotisations futures. 

Nous devons nous réjouir des améliorations apportées aux prestations garanties par le Régime de retraite. Toutefois, force est de constater que bien peu nombreux sont les retraités actuels qui en bénéficieront. Seule la modification 4 pourra bonifier les prestations qui reviendront aux héritiers de ceux d'entre nous qui, sans conjoint admissible, seront décédés ou décéderont moins de dix ans après leur départ à la retraite et après la date d'adoption du nouveau règlement. Des 53,2 millions de dollars redistribués, seulement 1,12 millions sont portés au compte des membres inactifs, soit 2,1%. Pourtant les membres inactifs représentent plus de 38 % des membres de la Caisse. Si on ajoute à ces dernières améliorations les valeurs de celles qui ont été accordées depuis 1996, ce sont 73,7 millions de dollars qui ont été crédités aux membres inactifs sur un total de 250,6 millions, soit 29,4% ; si on remonte à 1991, les chiffres sont, respectivement, de 106,5 millions, 399,9 millions et 26,6%.

Des cinq modifications aux règlements, la seconde ci-dessus aurait pu inclure les membres inactifs. On aurait pu assurer, en toute équité, une forme de rétroactivité qui aurait consisté à verser, à partir de maintenant, à tous les membres déjà retraités, des rentes égales à ce qu'elles seraient si les rentes initiales avaient été calculées sur la base de trois années. Le coût actuariel de cette hypothèse n'a pas été évalué parce que, apparemment, personne n'en a fait la demande ! L'APRUM devrait se saisir de cette question, éventuellement en collaboration avec les représentants des autres catégories de retraités. À suivre…!

Pierre Robert



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