Association des professeurs retraités
de l'Université de Montréal
Grains de sagesse
Été 2005, numéro
10
Les
collègues publient
Avec intensité
Vis
Du mourir
L'absurde absurdité
Ainsi se termine Sursis, ce long poème que Jeanne Demers a écrit
sur sa propre mort (Montréal, éditions
Carte blanche, 2004, 61p.). Un livre bouleversant dont le sous-titre — « ou
de mort dénoncée l'impossible poème » — est
lui-même le poème le plus saisissant que l'on puisse imaginer.
Aucune complaisance dans ce regard lucide, dur, souvent révolté,
sur une mort inévitable, jamais acceptée mais regardée
froidement et mise en perspective, dans un monde absurde où se multiplient
les guerres, les morts « endémiques » ou « épidémiques »,
toujours « incompréhensibles ». Jeanne, qui a été ma
collègue plus de trente ans, n'a jamais rien fait comme les autres.
Cette fois encore, elle a fait mieux. Merci, Jeanne!
Il est aussi question de mort dans le dernier roman de Gilles Marcotte,
Le manuscrit Phaneuf (Les éditions du Boréal, 2005, 224 pages).
Roman policier, car ce manuscrit déposé chez un éditeur
disparaît mystérieusement, en même temps que son auteur,
dont la noyade n'est peut-être pas accidentelle. Le lecteur québécois
reconnaîtra dans ce roman le milieu un peu artisanal et incestueux
des maisons d'éditions où éditeurs et auteurs se confondent
parfois, où les correcteurs peuvent aussi être auteurs. Il y
a aussi le rapport à la scène politique, qui ne doit pas être
négligé : Marcotte, qui a bien connu l'époque de Duplessis
(où pourrait se situer l'action de ce roman policier) et même
signé un livre intitulé La mort de Maurice Duplessis, aime
bien jouer sur les deux tableaux. Mais c'est en littéraire qu'il le
fait et il est facile de reconnaître, dans son personnage d'Arcade
Phaneuf, journaliste et sénateur qui confie à l'éditeur
avant de mourir un manuscrit intitulé Les Pharisiens, un proche parent
du journaliste Jean-Charles Harvey dont Les demi-civilisés avait fait
grand scandale en 1934, ou du notaire Berthelot Brunet dont Les hypocrites
avait, en 1945, soulevé l'ire des bien-pensants.
Le docteur Marcel J. Rheault vient de publier un ouvrage savant qui intéressera
aussi bien les historiens que les médecins : La médecine
en Nouvelle-France. Les chirurgiens de Montréal 1642-1760, (Les éditions
du Septentrion, 2004, 340 pages). La première partie de l'ouvrage
traite du statut des chirurgiens : à cette époque, ceux-ci
n'étaient pas diplômés d'une faculté de médecine,
mais ils savaient traiter les lésions traumatiques accidentelles
et les blessures de guerre. La seconde partie est consacrée à la
biographie de chacun des chirurgiens dans le gouvernement de Montréal
sous le Régime français, établie grâce aux actes
notariés, aux archives judiciaires et autres documents officiels.
Reculant encore plus loin dans notre passé, le géographe Camille Laverdière publie Le Sieur de Roberval, (Les éditions JCL inc., 2005, 160 pages). Ami d'enfance de François 1er qui lui donna le titre de sieur de Roberval, Jean-François de LaRocque n'aurait passé qu'un hiver près de Québec, sans jamais réussir à atteindre le Royaume du Saguenay qui lui a pourtant fait l'honneur de donner son nom à une ville. Après avoir été vice-roi de la Nouvelle-France, il est retourné en France, où il est mort assassiné en 1560.
Et l'avenir? S'il faut en croire Hubert Reeves, c'est du côté des
astres qu'il faut se tourner pour le connaître. Ses Chroniques du ciel
et de la vie (Paris, Seuil 2005, 210p.) partent d'une question un peu inquiétante — « Quel
mauvais sort semble avoir été jeté sur l'espèce
humaine? » — à laquelle l'observation scientifique
du cosmos propose peut-être une réponse : « Les
galaxies et les atomes nous permettent de mieux comprendre, et, peut-être,
de mieux maîtriser notre destin ».